Épisode majeur d’exposition au monoxyde de carbone dans une école primaire
Le 14 janvier 2019, un épisode majeur d’exposition au monoxyde de carbone est survenu dans une école primaire de Montréal. La fuite semble avoir été causée par une défaillance du système de chauffage, mais on ne sait toujours pas pourquoi le détecteur de monoxyde de carbone n’a pas fonctionné. Un grand nombre d’enfants et de membres du personnel ont présenté des symptômes, allant des maux de tête à la perte de conscience. Au moins 35 enfants et 8 adultes ont été hospitalisés, et plusieurs ont reçu un traitement en chambre hyperbare.
Compte tenu du niveau d’exposition et de la prévalence de symptômes importants, l’équipe de santé environnementale de la Direction régionale de santé publique de Montréal, en collaboration avec le CHU Sainte-Justine, le centre de santé et de services sociaux local, la direction de l’école et l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ), a organisé un suivi sur place pour procéder au dépistage des symptômes résiduels chez le personnel et les enfants. Cette entreprise massive et complexe, d’une durée de quatre jours, visait le dépistage neurocognitif de la totalité des élèves et du personnel de l’école, ainsi que l’évaluation approfondie des patients présentant des signes ou symptômes par un pédiatre. Des 274 enfants présents le jour de l’incident, 244 ont été évalués sur place. De ce nombre, 106 ont subi une évaluation secondaire par le pédiatre. Notre analyse des résultats actuellement en cours brossera un portrait de la prévalence et de la nature des symptômes.
L’heure est à la défense d’intérêts
Au Québec, les détecteurs de monoxyde de carbone sont obligatoires dans les établissements de soins de longue durée depuis 2014 et dans les garderies depuis 2016. Dans les deux cas, le changement à la réglementation s’est fait en réaction à des incidents (soins de longue durée, garderie). Dès que nous avons réalisé l’ampleur sans précédent de l’incident, nous avons commencé à penser à des manières d’en faire une occasion de changer les choses. Nous avons rapidement contacté des collègues du ministère et axé nos interventions médiatiques sur le rôle crucial des détecteurs de monoxyde de carbone dans la prévention des répercussions sur la santé. Quatre jours après l’incident, le ministère de l’Éducation avait déjà exigé que toutes les écoles de la province fournissent immédiatement une preuve d’installation de détecteurs ou de vérification de leur bon fonctionnement et manifesté leur intention de proposer un règlement d’ici l’été.
Enseignements tirés
Bien qu’il soit extrêmement malheureux qu’autant d’enfants et d’employés aient souffert d’une exposition au monoxyde de carbone, la rapidité de la réponse ministérielle illustre parfaitement pourquoi il est important d’utiliser ces incidents pour faire avancer nos politiques publiques. Cette tendance à légiférer en réaction à des épisodes d’exposition n’est pas exclusive au Québec, et cette réalité des pratiques de santé environnementale est là pour rester. Il est évident que nous continuerons de tenter de prévenir ces types d’incidents, surtout lorsque les mesures préventives sont relativement faciles à mettre en œuvre, mais nous devrons tout de même rester à l’affût de l’actualité pour catalyser le changement politique localement et, lorsque c’est possible, à plus grande échelle.
L’incident a aussi mis en lumière le rôle que la couverture médiatique peut jouer pour donner du mordant aux efforts de défense d’intérêts en santé publique comme les nôtres. Bien que les décisions politiques suivent un processus complexe et parfois obscur, la couverture que nous avons reçue nous a indubitablement donné de la visibilité et a généré des pressions pour trouver des solutions rapides et appropriées.
A propos de l'auteur
David Kaiser est spécialiste de la santé publique et de la médecine préventive à Santé publique Montréal, où il est le médecin responsable de l'équipe de santé environnementale. David est également directeur du programme de résidence en santé publique et en médecine préventive à l'Université McGill.
PHOTO CREDIT: Allen McInnis, Montreal Gazette