Opinion de la population canadienne sur le bruit ambiant
L’exposition au bruit ambiant est un enjeu de plus en plus préoccupant au Canada et dans le monde. Le bruit ambiant désigne les sons non désirés causés par l’activité humaine; il comprend des sons produits par des éléments qui nous entourent : circulation routière, transport en commun, avions, construction, souffleuses à feuilles, et même terrains de tennis léger. On s’attend à ce que l’exposition au bruit augmente à l’échelle mondiale en raison de la demande accrue de transport, de logement et d’infrastructures due à la croissance démographique. Récemment, la baisse du volume dans les centres urbains de la planète durant les confinements associés à la COVID-19 et l’intérêt renouvelé pour les bienfaits pour la santé des espaces verts généralement plus calmes ont influencé l’opinion des Canadiens sur l’exposition au bruit. Ce billet de blogue survole les connaissances, attitudes et tendances actuelles en matière d’exposition au bruit ambiant et explique comment les praticiens en santé environnementale peuvent contribuer à la gestion proactive du bruit.
Quels sont les effets de l’exposition au bruit sur la santé?
Beaucoup de gens connaissent les effets néfastes que peut avoir l’exposition aux bruits très forts, comme la perte auditive et l’acouphène. À court terme, les effets non auditifs de l’exposition au bruit – par exemple l’inconfort, l’agacement, la perte de productivité et le manque de sommeil – peuvent aussi nuire à la santé, surtout si l’exposition a lieu à un endroit où les gens passent beaucoup de temps, comme le lieu de travail et le domicile. L’exposition chronique cause aussi des lésions à l’oreille interne, et est associée à de nombreux effets sur la santé qu’on croit issus des mécanismes biologiques de stress, notamment les maladies cardiovasculaires, les maladies métaboliques, les troubles cognitifs et les problèmes de santé mentale.
Que pensent les Canadiens à propos du bruit?
En mars 2022, Santé Canada a publié les résultats d’une enquête nationale sur les perceptions et les attitudes face à l’exposition au bruit, une mise à jour d’une enquête de 2005. La nouvelle enquête sondait les résidents sur leur degré d’agacement par rapport à diverses sources de bruit. La gêne est une mesure couramment utilisée dans les évaluations des conséquences du bruit pour estimer le fardeau pour la santé de l’exposition. Une prévalence accrue de l’agacement serait associée à un volume accru.
L’enquête de Santé Canada souligne les différences dans les sources de gêne causée par le bruit entre les résidents de zones urbaines, suburbaines et rurales. La circulation routière est une grande source de bruit ambiant pour les résidents de milieux urbains, beaucoup plus susceptibles d’exprimer un agacement dû à la circulation que ceux des milieux suburbains et ruraux. L’enquête compare aussi la prévalence de la gêne causée par diverses sources de bruit par régions géographiques, comme le montre le tableau ci-dessous.
|
Milieu urbain |
Milieu suburbain |
Milieu rural |
Principales sources de gêne causée par le bruit chez les Canadiens |
Circulation routière |
Tondeuses |
Éoliennes |
Avions |
Taille-haies |
Exploitation minière |
|
Industrie (autre que l’exploitation minière) |
Souffleuses à feuilles |
Activités marines |
|
Construction (y compris signaux de recul) |
Scies à chaîne |
|
Tableau adapté des résultats de l’enquête Canadian Perspectives on Environmental Noise Survey (2022).
Évolution des tendances d’exposition au bruit
Les populations urbaines sont généralement exposées à plus de bruit ambiant que les populations suburbaines et rurales. Cependant, les nouvelles tendances dans le milieu de vie et de travail entraînées par la pandémie de COVID-19 pourraient avoir un effet sur leur exposition aux bruits. Par exemple, l’augmentation du travail à domicile pourrait rendre les gens plus conscients de bruits qu’ils n’avaient pas remarqués , puisqu’ils passaient auparavant leurs heures de travail hors de la maison. Une récente enquête auprès de Canadiens menée en octobre 2020 révèle que 78 % des répondants entre 18 et 34 ans avaient été dérangés par des bruits à la maison dans la dernière année, la plus haute proportion parmi les groupes d’âge de l’étude. Cela pourrait refléter le fait que ce groupe est plus susceptible de faire du télétravail dans un immeuble à logements multiples , souvent situé à proximité d’infrastructures bruyantes comme les routes et les transports en commun. La montée du télétravail, couplée à la hausse des prix du logement dans les centres urbains, a aussi alimenté un « exode urbain » national, alors que nombre de Canadiens ont choisi de s’établir en banlieue ou en milieu rural. Une enquête de 2021 a montré qu’un Canadien sur trois souhaitait déménager dans une plus petite municipalité ou en zone rurale, et que 40 % de ceux qui voulaient déménager recherchaient avant tout la tranquillité. Les résidents de milieux ruraux ont aussi des attentes de tranquillité dans leur collectivité supérieures à celles de leurs concitoyens des milieux urbains et suburbains, ce qui pourrait poser problème dans un contexte où les collectivités rurales doivent augmenter leurs infrastructures pour répondre aux demandes d’une population croissante .
Le son des possibilités
Pour répondre à la demande de logement d’une population croissante dans les collectivités urbaines et rurales, le Canada connaît actuellement une phase sans précédent de construction de logements. Un récent rapport estimait qu’en 2021, le nombre de logements en construction a atteint un sommet jamais vu depuis 1977. Les nouvelles constructions formant de nouveaux quartiers, cette vague est une bonne occasion d’inclure l’exposition au bruit dans l’ aménagement du territoire . Les mesures prises pour gérer l’exposition au bruit sont souvent réactives plutôt que proactives. L’atténuation du bruit est un aspect important de la réduction de l’exposition aux sources existantes, mais la recherche actuelle indique que la prise en compte du bruit dans la planification de l’utilisation du territoire est plus efficace pour favoriser un paysage sonore salutaire. Bien que la gestion du bruit en milieu urbain demeure un élément important de la réduction du fardeau pour la santé associé au bruit ambiant, la préservation de la tranquillité dans les espaces verts et les zones rurales est un moyen tout aussi important de réduire l’exposition globale au bruit des Canadiens.
Il est nécessaire d’accroître la collaboration entre les praticiens en santé environnementale et les aménageurs du territoire en matière de bruit et de gestion du bruit. Les praticiens en santé environnementale peuvent promouvoir la gestion du bruit ambiant dans leur collectivité en fournissant des données probantes sur les effets de l’exposition sur la santé et en travaillant avec les autorités régionales pour élaborer des politiques de gestion du bruit adaptées aux besoins de la population. Un outil de gestion pratique est un plan d’action en matière de bruit pour la collectivité qui encadre la réduction du bruit ambiant provenant de sources connues (routes, aéroports, voies ferrées, etc.) et la protection des zones tranquilles. Les praticiens en santé environnementale peuvent aider les intervenants à créer un plan d’action par les moyens suivants :
- Faire ou guider une évaluation de l’exposition au bruit dans la collectivité, avec des outils comme un sondage sur la gêne causée par le bruit ou une carte du bruit .
- Fournir des conseils fondés sur les données probantes pour les cibles de réduction du bruit .
- Soutenir les efforts de consultation publique associés à l’exposition au bruit et aux stratégies de réduction du bruit par la sensibilisation du public, ou évaluer les attitudes du public quant au bruit ambiant.
- Appuyer la surveillance continue de l’exposition au bruit et l’évaluation de l’efficacité des mesures d’atténuation en place.
Résumé
L’exposition au bruit devrait s’accentuer au Canada en raison de la croissance de la population et de la densification des collectivités. Bien que les centres urbains ressentent un fardeau global accru à cet effet, les milieux ruraux vivent d’autres problèmes liés au bruit, provenant en partie des grandes attentes de tranquillité des résidents et du besoin accru de construction d’infrastructures pour répondre aux besoins de la population croissante. La prise en compte des questions de gestion du bruit dans la planification de l’usage du territoire serait la méthode la plus efficace de réduction de l’exposition au bruit. Les praticiens en santé environnementale peuvent aider les collectivités à s’engager à faire de cet enjeu une priorité en aidant à la création d’un plan d’action en matière de bruit. Comme le démontre l’enquête 2022 de Santé Canada, l’exposition au bruit ambiant est un enjeu de plus en plus préoccupant au pays. Ainsi, une approche proactive de gestion du bruit est nécessaire pour protéger les Canadiens des effets du bruit ambiant sur la santé.
Citation
James K. Opinion de la population canadienne sur le bruit ambiant [blog]. Vancouver, C.-B.: Centre de collaboration nationale en santé environnementale; 14 avril 2022. Disponible sur: https://ccnse.ca/content/blog/opinion-de-la-population-canadienne-sur-le-bruit-ambiant.