Examen rapide du recours aux barrières physiques dans les milieux non cliniques pour prévenir la transmission de la COVID 19
Messages clés
- Des données probantes épidémiologiques et expérimentales indiquent que les barrières physiques peuvent réduire le risque de transmission. Cependant, des difficultés dans l’élaboration de directives de conception et d’installation claires ainsi que dans l’évaluation des effets en contexte réel compliquent l’évaluation de leur efficacité.
- Les barrières physiques servent un objectif précis, mais limité. Elles ont pour but de prévenir la transmission bidirectionnelle rapide de particules respiratoires survenant quand deux personnes ont des interactions rapprochées.
- Elles n’éliminent pas les virus et n’en retirent pas une quantité substantielle de l’air. Toutefois, en redirigeant les émissions hors de la zone respiratoire, elles laissent le temps aux appareils de ventilation et de filtration de l’air de réduire la concentration des particules infectieuses. Elles vont ainsi de pair avec une bonne ventilation, qui a une action complémentaire.
- Les barrières ne sont pas appropriées dans tous les milieux; leur nécessité dépend des activités et des interactions des personnes. Leur utilisation est la plus profitable pour les gens qui ont des contacts fréquents, mais courts, avec des personnes à risque élevé. Elle l’est moins pour ceux qui ont des contacts prolongés, surtout dans des milieux sans ventilation.
Introduction
En mars 2020, les barrières physiques et les cloisons en verre, en plastique ou en plexiglas sont devenues un élément fondamental de la réponse de la santé publique à la pandémie et étaient presque omniprésentes dans les endroits publics intérieurs. Au départ, très peu de conseils et de données en guidaient l’utilisation hors des milieux de soins pour contrôler une maladie respiratoire. Étant donné la grande variété des milieux non cliniques concernés, les premiers travaux sur le sujet se fondaient sur des suppositions logiques relatives à la transmission de la COVID-19, sur les possibles interactions entre les membres du public, sur les autres mesures de santé publique en vigueur (p. ex., port du masque) et sur les expériences antérieures en matière de prévention et de contrôle des infections dans les milieux cliniques.
Au fil de la pandémie, les barrières physiques sont devenues incontournables dans certains environnements, tandis que leur utilité a été remise en question dans d’autres1. La pandémie a également changé notre perception des endroits publics, et certaines des mesures protectrices et des pratiques adoptées pourraient s’avérer avantageuses pour la création d’un avenir plus résilient face aux pandémies2. Qu’avons-nous appris sur le rôle des barrières dans nos plans de prévention de la COVID-19? Cet examen rapide s’intéresse : 1) aux directives et aux recommandations actuelles relatives à l’adoption de barrières physiques dans divers milieux non cliniques; et 2) aux données probantes sur l’efficacité des barrières, employées seules ou avec d’autres mesures sanitaires, à prévenir la transmission de la COVID-19.
Méthodologie de recherche documentaire
Pour l’examen des recommandations passées, nous avons consulté Google et les sites Web des grandes agences de santé publique pour y repérer des guides sur le déploiement des barrières physiques. Plus de 30 sites Web et documents sur le sujet ont été relevés. Ils ont servi à comprendre les pratiques et les recommandations antérieures seulement; ils n’ont pas été évalués, et seuls les plus complets sont présentés ici.
Ensuite, nous avons fouillé les publications universitaires et parallèles au moyen des bases de données EBSCOhost (Medline, CINAHL, Academic Search Complete, ERIC, etc.), de Google Scholar et de Google pour y trouver des données probantes sur l’efficacité des barrières physiques. Nous avons retenu les articles pertinents de langue anglaise publiés entre mai 2020 et novembre 2021, auxquels nous avons ajouté d’autres articles repérés à partir ou faisant mention de ceux retenus. La liste complète des syntagmes de recherche et des résultats est disponible sur demande. Les études sélectionnées pour examen étaient celles qui portaient sur l’utilisation d’écrans, de cloisons ou de barrières comme mesure de santé publique dans un milieu non clinique. Les articles révisés par des pairs et les prépublications ont été inclus. Cependant, les lettres médicales sur l’utilisation de mesures d’isolement ou d’écrans improvisés dans le cadre d’interventions médicales générant des aérosols ont été exclues puisqu’elles n’étaient pas représentatives du type d’exposition qui survient dans les milieux non cliniques.
Treize études primaires (prépubliées ou révisées par des pairs) et deux synthèses3, 4 (publications parallèles) étaient disponibles pour examen. Sept études se sont penchées sur l’effet des barrières physiques dans des modèles virtuels ou physiques. Un modèle virtuel fait appel à la dynamique numérique des fluides (DNF) et à d’autres outils pour modéliser le mouvement de particules dans un espace virtuel. Un modèle physique, quant à lui, nécessite la création d’une chambre d’exposition à l’image d’un bureau, d’une salle de classe ou d’un autre endroit où sont placés des mannequins. Un simulateur de toux est alors utilisé pour examiner le déplacement et le devenir des particules dans un environnement non virtuel aux conditions très contrôlées. Les modèles virtuels sont souvent validés à partir de modèles physiques. Certaines études fournissent les deux. Six études observationnelles ont examiné l’efficacité des barrières physiques en contexte réel. Chacune d’entre elles a été évaluée par une personne, et les résultats ont été synthétisés de façon narrative. La synthèse a ensuite été soumise à deux examens, l’un interne et l’autre externe.
Résultats
Quels étaient les objectifs et les recommandations de départ concernant les barrières physiques?
En mai 2020, le CCNSE a publié les résultats d’une consultation rapide sur le recours aux barrières physiques dans le cadre de plans de sécurité relatifs à la COVID-19 menée auprès d’experts techniques, de professionnels du secteur et de spécialistes en prévention et en contrôle des infections5. Ce document avait pour but d’aider les agences de santé publique et de santé au travail à intégrer l’utilisation des barrières physiques à la planification des mesures de santé et de sécurité. Depuis, de nombreux autres organismes ont publié des directives détaillées sur le recours aux barrières physiques, directives qui peuvent servir à cibler les objectifs et les lacunes dans les connaissances entourant l’adoption des barrières comme mesure de santé publique. Cependant, bien que plusieurs documents et sites Web aient été repérés pour cet examen, seuls quelques-uns traitaient en détail de la mise en œuvre des barrières (tableau 1).
Tableau 1. Exemples de guides détaillés sur les barrières physiques.
Organisme |
Milieux visés |
National Institutes of Health (sans date). Proper Use of Barriers (Plexiglass/Lexan) in the Workplace6. |
Milieux de travail généraux, y compris les laboratoires. |
Centres for Disease Control and Prevention des États-Unis (sans date). Strategies for Protecting K-12 School Staff from COVID-197. |
Seul grand guide de santé publique axé sur le milieu scolaire et donnant des conseils sur l’utilisation de barrières physiques en classe. |
Université de Washington (oct. 2020). Guidance for plexiglass barriers in support of COVID-19 prevention efforts8. |
« Lieux à fort volume » de l’Université, soit des endroits où ont lieu des contacts fréquents; les salles de classe sont exclues. |
WorkSafeBC (mai 2020). COVID‑19 health and safety: Designing effective barriers9. |
Milieux de travail généraux; comprends les véhicules partagés. |
Université McMaster (juillet 2020). Guidelines for the Use of Physical Barriers During COVID-19 Pandemic10. |
Milieux de travail où ont lieu des contacts fréquents et où le maintien d’une certaine distance est impossible, ainsi que véhicules et espaces communs de bibliothèques; les salles de classe sont exclues. |
Southwestern Public Health (sept. 2020). Physical Barriers to Prevent the Spread of COVID-1911. |
Bars, restaurants, bureaux, comptoirs pour emporter, comptoir de réception et espaces scolaires communs non réservés à une cohorte. |
Les objectifs initiaux des barrières physiques et les limites associées à leur utilisation sont résumés dans l’encadré 1. Cette synthèse vise à clarifier l’intention qui sous-tendait les directives et de préciser à quel moment ou pour quelles raisons les objectifs n’ont pas toujours été clairement communiqués.
Encadré 1. Principaux objectifs et limites de l’utilisation des barrières physiques dans les endroits publics |
Dans les documents retenus, les objectifs implicites ou explicites du recours aux barrières physiques dans les endroits publics étaient entre autres les suivants :
Enjeux ou risques potentiels associés à l’utilisation des barrières physiques :
|
Une des lacunes potentielles dans la communication concernait l’adaptation des barrières physiques aux différents contextes. La plupart des guides s’attardaient à un milieu de travail général et ne traitaient que brièvement de milieux en particuliers ou des mesures à prendre pour une situation donnée (p. ex., travail assis, travail debout, ou alternance entre les deux)8,9,11. Seul un guide recommandait l’utilisation de barrières dans les salles de classe, mais donnait peu de détails à ce sujet7. D’autres guides proposaient l’utilisation de cloisons en milieu scolaire, mais pas en classe. Ils recommandaient plutôt l’utilisation de barrières par les enseignants ayant des interactions fréquentes ou dans les espaces intérieurs communs où les étudiants de diverses cohortes devaient interagir (p. ex., bibliothèque)8.
Quelles leçons peut-on tirer des modèles virtuels et physiques quant au rôle des barrières dans la prévention de la transmission de la COVID-19?
Les études basées sur les modèles virtuels ou physiques sont utiles parce qu’elles donnent aux chercheurs le contrôle de facteurs pouvant grandement varier en contexte réel, comme l’emplacement de la source infectieuse, le type et le débit de la ventilation mécanique, de même que le nombre et l’emplacement des autres occupants. Ce type d’environnement simplifié facilite l’examen de l’influence qu’exercent les cloisons sur le déplacement des particules dans une pièce, le dépôt de ces dernières sur les surfaces et les personnes, et l’élimination des aérosols. Les modèles virtuels et physiques peuvent également servir à l’étude du rôle complémentaire que jouent les autres mesures de santé publique comme le port du masque, la distanciation, l’augmentation de la ventilation, l’ouverture des fenêtres et l’utilisation de purificateurs d’air.
Abuhegazy et coll.12 ont utilisé un modèle de DNF pour examiner l’effet de barrières de 70 cm de haut sur le déplacement des particules dans une salle de classe où se trouvaient neuf étudiants. Les barrières, installées sur les bureaux, ont réduit de 92 % en moyenne le nombre d’aérosols passant de l’étudiant infecté aux huit autres étudiants et ont diminué de 63 % le dépôt des particules sur ces derniers, mais elles ont également ralenti l’élimination des aérosols dans la salle. De même, Mirzaei et coll.13 ont suivi le déplacement de plus de 10 000 particules respiratoires (0,150 à 150 mm) dans une classe de 30 étudiants après que l’enseignant infecté a toussé une seule fois. Là aussi, les barrières sur les bureaux ont fait augmenter le temps nécessaire pour que toutes les gouttelettes émises se déposent ou soient éliminées de la pièce, et elles ont réduit le nombre total de particules auxquelles chaque étudiant a été exposé. Ensemble, l’installation de barrières et l’augmentation de la ventilation ont réduit davantage l’exposition aux particules et le temps nécessaire pour leur élimination.
Ren et coll.14 ont développé un modèle de DNF dans un bureau à espace ouvert occupé par 43 personnes et ont examiné l’effet de barrières de 40 à 70 cm sur la dispersion des particules et le risque d’infection. Les barrières de 60 cm de haut ou plus étaient les plus efficaces pour réduire la dispersion des particules dans la pièce; par exemple, une barrière de 60 cm réduisait le risque de transmission de 72 %. Toutefois, l’emplacement du cas index dans la pièce était important : plus le cas était loin de la sortie ou des évents d’aération, moins les barrières étaient efficaces pour réduire la dispersion et le risque d’infection.
Dans le même ordre d’idées, Bartels et coll.15 ont simulé la toux d’un client sur un travailleur, avec et sans barrière, et ont constaté qu’une barrière de taille moyenne (allant jusqu’à environ 40 cm au-dessus de la bouche d’une personne) était la plus efficace pour réduire le nombre de particules pénétrant dans la zone respiratoire du travailleur. Les barrières très hautes ne procuraient aucun avantage supplémentaire, et la plus haute de la simulation a possiblement nui à la circulation de l’air dans la pièce. Ye et coll.16 ont aussi conclu qu’une barrière allant jusqu’à au moins 3 à 5 cm au-dessus de la bouche d’une personne suffisait à limiter la dispersion latérale du jet expiratoire de cette personne.
L’une des grandes préoccupations associées aux barrières physiques est que ces dernières sont susceptibles de mieux protéger contre les grosses particules que contre les petites, surtout avec l’augmentation du temps passé dans l’espace. Les études susmentionnées ont porté sur un court laps de temps (moins de 15 minutes), qui suffit pour analyser la dispersion et le risque d’infection après qu’une source unique a toussé ou éternué une seule fois. Ce modèle simplifié s’applique davantage aux milieux dans lesquels des travailleurs en santé ont plusieurs courtes interactions durant la journée et où les clients ne restent pas longtemps (p. ex., magasin de vente au détail). Il est toutefois moins applicable aux milieux où les personnes partagent un même espace pendant une longue période (p. ex., bureaux, salles de classe) ou lorsque la probabilité qu’il y ait plus d’une source infectieuse dans la pièce est élevée, comme c’est le cas en période de forte transmission communautaire.
Cette préoccupation est particulièrement importante dans les salles de classe, où l’exposition est prolongée, où le port et l’ajustement du masque sont variables et où la couverture du visage peut entraîner des difficultés de communication avec les jeunes enfants. Epple et coll.17 ont simulé une salle de classe dans laquelle se trouvaient des capteurs d’aérosols et des mannequins émettant de la vapeur pour évaluer l’effet protecteur du masque, des barrières physiques, de l’ouverture des fenêtres et de la ventilation personnalisée. Le port du masque seul a rapidement entraîné l’exposition des « étudiants » environnants aux aérosols s’étant échappés du masque. Toutefois, l’ajout d’une cloison a freiné cette exposition pendant 10 à 13 minutes, après quoi la vapeur est passée par-dessus la barrière et a contaminé les « étudiants » à la gauche et à la droite de celui infecté. Pour s’attaquer à ce problème, les auteurs ont testé l’utilisation d’un système de ventilation personnalisée composé de tubes d’aluminium flexibles suspendus au-dessus de chaque cubicule pour aspirer l’air, et ont constaté que ce système a grandement réduit l’accumulation d’aérosols à l’intérieur des cubicules (analyse qualitative seulement).
Les restaurants présentent aussi des défis uniques. Comme les clients enlèvent leur masque pour manger et que le fait de manger peut être associé à celui de socialiser, les barrières sur table et les cubicules sont devenus une mesure clé pour empêcher le transfert de particules respiratoires. Par ailleurs, la chaleur corporelle et la chaleur dégagée par la nourriture peuvent également favoriser la montée et la propagation des particules16. Liu et coll.18 ont créé deux modèles de DNF pour examiner l’effet de multiples sources, avec et sans barrières, dans deux salles à manger pendant 30 minutes. Les auteurs ont comparé une grande cafétéria avec 1,8 m entre les occupants (ventilée à 19,5 renouvellements par heure) à la salle à manger plus étroite et plus occupée d’un restaurant, ventilée à 9,1 renouvellements par heure. L’emplacement des barrières a empêché le mélange d’air stimulé par la ventilation, ce qui a réduit le déplacement latéral des aérosols. Cependant, le risque variait selon la position de la source et des autres convives : la plupart des clients ont vu leur risque diminuer, mais certains l’ont vu légèrement augmenter. Dans l’ensemble, le risque d’infection était beaucoup plus faible dans l’endroit plus grand et mieux ventilé, où les barrières n’avaient qu’une petite incidence principalement en raison de la plus grande distance entre les personnes (1,8 m). À l’inverse, les barrières avaient un effet plus positif (mais tout de même limité) dans l’endroit plus étroit et moins ventilé.
Une autre préoccupation est que les clients d’un restaurant peuvent se succéder rapidement sur un siège ou dans un cubicule, de sorte que les particules exhalées par une personne peuvent être inhalées par la suivante. Liu et coll.18 ont examiné l’accumulation de l’air expiré par un client dans un cubicule, dans des conditions de ventilation précises et en présence de barrières. Ils ont conclu que les barrières entraînaient une accumulation, mais qu’une attente d’au moins six minutes avant de faire asseoir une nouvelle personne faisait passer le risque d’infection d’environ 4,5 % à moins de 1 %. De même, Ye et coll.16 ont indiqué que les barrières de table causaient l’accumulation de l’air expiré, et que l’effet était plus marqué lorsque les tables étaient munies de barrières croisées, plutôt que de barrières linéaires allant d’un côté à l’autre seulement. Le retour de l’air à son niveau de départ a pris 11 minutes, mais la plus grande réduction du risque (80 à 90 %) s’est produite dans les deux ou trois premières minutes. Les deux études ont conclu que les barrières étaient utiles pour réduire (sans toutefois éliminer) le risque d’infection des personnes avoisinantes, mais qu’elles posaient aussi un petit risque pour les clients suivants durant la période étudiée. Ce petit risque aurait toutefois pu être éliminé si le modèle avait tenu compte des mouvements aléatoires des occupants et de leur effet subséquent sur le mélange d’air.
Dans l’ensemble, les études examinées montraient que l’installation de barrières avait des effets positifs en réduisant (sans éliminer) la dispersion latérale. Les avantages étaient les plus grands pour les personnes qui étaient proches de la source, plutôt que pour les personnes qui étaient loin ou qui se trouvaient du même côté. En outre, les modèles s’avèrent utiles pour démontrer la grande hétérogénéité des endroits intérieurs. En effet, il n’est pas toujours possible d’évaluer à l’œil le risque que court une personne puisque des facteurs comme la configuration et le débit du système de ventilation ainsi que la propriété des barrières à entraver ou à favoriser la circulation d’air peuvent donner naissance, de façon imprévisible, à des zones de risque faible ou élevé18.
Les modèles virtuels et physiques décrits plus haut comportent plusieurs limites pouvant mener à la surestimation de leurs retombées. D’abord, ils s’intéressent aux expositions de moins de 30 minutes, qui sont moins utiles à la connaissance du risque d’infection dans des milieux comme les salles de classe et les bureaux. Ensuite, ils ne tiennent pas compte de la parole – en particulier de la parole à voix forte dans un environnement bruyant –, qui peut faire augmenter l’émission de particules, ni de facteurs comme les changements de position, les mouvements de tête et les déplacements des personnes dans la pièce, qui peuvent influencer le mélange d’air et faire augmenter ou diminuer le risque d’exposition. Enfin, les modèles de DNF en particulier ne prennent pas en considération l’infiltration et l’exfiltration passives d’air, qui peuvent influencer la dispersion des particules dans la pièce.
Que disent les données probantes sur les cloisons en contexte réel?
Comparativement aux données tirées d’environnements virtuels ou simulés, les données issues du monde réel sont plus limitées et plus difficiles à interpréter. Comme les barrières physiques ont été adoptées quasi universellement dans le cadre d’une série de mesures de santé publique recommandées, il peut être difficile d’évaluer le rôle qu’elles jouent dans la prévention de la transmission. De surcroît, la façon dont les données sont recueillies fait qu’il est parfois difficile de savoir si certaines mesures ont été bien respectées ou mises en œuvre.
Deux études récentes menées aux États-Unis se sont appuyées sur des données de sondage pour évaluer l’efficacité de mesures individuelles dans des écoles. Gettings et coll.19 ont utilisé des données de sondage venant de 169 écoles (de la maternelle à la cinquième année) de l’État de Géorgie pour examiner le lien entre l’incidence de la COVID-19 à l’école et les mesures de santé publique dans les salles de classe (port du masque, congé médical flexible, amélioration de la ventilation, distanciation et installation de barrières sur les bureaux). Les données ont été recueillies en novembre et en décembre 2020. Le port obligatoire du masque par les enseignants et le personnel (mais pas par les élèves) et l’association de la ventilation par dilution et de la filtration d’air semblaient réduire l’incidence de la COVID-19 en milieu scolaire. En revanche, les écoles ayant installé des barrières sur les bureaux et les tables de toutes les classes (n = 38 écoles) n’ont présenté aucune diminution du risque relatif de COVID-19, comparativement aux écoles n’en ayant pas installé ou en ayant installé dans quelques classes seulement. Ce résultat laisse penser que les barrières n’ont pas aidé à réduire la transmission. En outre, l’analyse des données relatives à l’amélioration de la ventilation n’a montré aucune différence quant à l’incidence de la COVID-19 entre les écoles ayant apporté des améliorations et celles ne sachant pas si des améliorations avaient été apportées. Ce constat met en évidence un enjeu associé à l’utilisation de données autodéclarées : le fait de laisser la mise en œuvre des mesures et la production de rapports sur leur efficacité entre les mains de non-experts peut engendrer une plus grande incertitude au moment d’interpréter les données.
De même, Lessler et coll.20 ont utilisé les données issues du sondage sur les symptômes de COVID-19 déployé sur Facebook pour examiner le lien entre une infection s’apparentant à la COVID-19 ou l’obtention d’un résultat positif au dépistage chez les enfants et les mesures d’atténuation en place dans leur école. Les mesures associées à la plus grande diminution du risque étaient la vérification quotidienne des symptômes, le port obligatoire du masque par les enseignants et l’annulation des activités parascolaires. De nombreuses autres mesures courantes, comme le port du masque par les élèves, la distanciation, le regroupement en cohortes et la réduction de la taille des classes, n’ont eu aucun effet. Certaines mesures, comme l’installation de barrières sur les bureaux, l’enseignement à l’extérieur et le jeu à l’intérieur, tendaient quant à elles vers une augmentation du risque d’infection s’apparentant à la COVID-19. Cependant, la plus importante leçon tirée de cette étude était que la combinaison des mesures préventives réduisait de façon significative le risque de COVID-19. Chaque mesure supplémentaire réduisait de 9 % le risque d’infection s’apparentant à la COVID-19, et l’adoption d’au moins sept mesures faisait en sorte que ce risque était le même que si l’école avait lieu à la maison. Même si l’ensemble de données utilisé était important (plus de 500 000 répondants), il était limité par le fait que les données sur les mesures d’atténuation étaient déclarées par les parents, qui ne sont généralement pas présents en classe et ne savent pas toujours comment bien mettre ces mesures en œuvre.
Seules trois études ont examiné l’effet d’atténuation des barrières en s’appuyant sur une évaluation d’experts menée sur place. Doron et coll.21 se sont intéressés à une éclosion qui a commencé dans un bureau scolaire. Les possibles facteurs contributifs comprenaient le fait de manger à plusieurs sans masque, les espaces de bureau communs et les aires à forte circulation. Les auteurs ont étudié la circulation de l’air au moyen de tests de fumée et ont conclu que les barrières en place pourraient avoir nui au mélange de l’air. Les barrières de plexiglas n’ont pas été retirées, mais elles ont été déplacées pour permettre une meilleure circulation d’air.
Au Japon, Ishigaki et coll.22 se sont servis d’un gaz de dépistage (CO2) pour étudier la circulation de l’air dans un bureau récemment impliqué dans une éclosion. Les gestionnaires avaient divisé le bureau non ventilé en cinq zones au moyen de barrières de plastique; chaque zone comptait de trois à huit occupants masqués. Pendant l’éclosion, les cas étaient répartis dans trois zones, tandis qu’il n’y avait aucun cas dans les deux zones avoisinantes. Comme les fenêtres restaient fermées en raison de la température hivernale, la porte demeurait la seule voie de circulation d’air. Les barrières n’atteignaient pas le plafond, mais elles étaient assez hautes pour que le CO2 s’accumule dans chaque compartiment. Ainsi, il est possible qu’elles aient fait augmenter la transmission au sein des compartiments, tout en empêchant la propagation aux compartiments environnants. Il convient toutefois de préciser que l’utilisation de barrières pour confiner plusieurs personnes dans un endroit non ventilé va à l’encontre des recommandations de santé publique.
L’évaluation la plus éclairante des effets des barrières physiques sur le risque de COVID-19 vient possiblement d’usines d’emballage de viande. Ces usines ont été grandement touchées par la pandémie, des facteurs environnementaux intérieurs, professionnels et même socioculturels y ayant fait augmenter l’exposition interpersonnelle et facilité la transmission du virus23. La vérification de la température, le port du masque et l’installation de barrières étaient trois des mesures préventives les plus utilisées selon des sondages menés auprès des usines24, 25.
Herstein et coll.26 ont tenté de quantifier les effets du port du masque et de l’installation de barrières sur l’incidence de la COVID-19 dans 13 usines. Parmi les 11 usines ayant adopté ces deux mesures, huit ont présenté une diminution significative de l’incidence de la COVID-19, une a présenté une augmentation, et deux n’ont pas présenté de changement. Trois des usines ont recueilli suffisamment de données pour examiner l’effet différentiel de l’adoption du port du masque d’abord, puis de l’installation de barrières après un certain temps. Dans deux de ces usines, l’ajout de barrières au port du masque a entraîné une diminution importante des cas de COVID-19. Toutefois, dans la troisième usine, le port du masque a suffi à lui seul à réduire l’incidence de la COVID-19, et l’ajout de barrières n’a apporté aucun avantage supplémentaire. Deux usines ont simplement adopté le port du masque (pas de barrière), et aucune d’entre elles n’a constaté une réduction significative de l’incidence de la COVID-19 durant la période à l’étude.
Collectivement, ces données portent à croire que l’installation de barrières physiques a eu un effet supplémentaire sur la réduction de la transmission de la COVID-19 dans les usines d’emballage de viande26. Bien que des relativement peu d’usines (n = 13) aient été incluses dans l’étude, les chercheurs ont visité chacune d’entre elles, ce qui a permis de mieux évaluer la mise en œuvre et le respect des mesures. Cependant, le port du masque et l’installation de barrières, individuellement ou ensemble, n’ont pas suffi pour prévenir complètement la transmission de la maladie. Ce résultat était attendu étant donné que de nombreux facteurs peuvent influencer la transmission et entraîner une éclosion, comme les changements de comportements à l’intérieur et à l’extérieur de l’usine n’ayant pas été pris en considération dans l’étude. En outre, le masque et les barrières n’étaient pas toujours utilisés simultanément (p. ex., dans la salle à manger, comparativement aux postes de travail); ainsi, l’effet des barrières ne s’ajoutait pas toujours à celui des masques si la transmission avait lieu au moment des repas.
Contrairement aux personnes longuement exposées dans les salles de classe et certains milieux de travail, les pharmaciens communautaires ont des interactions courtes avec les clients; or, ils sont plus à risque de croiser de multiples personnes infectées au cours de la journée. Des données de sondage recueillies dans trois pays du Moyen-Orient ont révélé qu’après la prise en compte d’autres facteurs, les pharmaciens communautaires qui travaillaient sans barrière physique couraient un risque d’infection à la COVID‑19 2,2 fois supérieur27. Ce constat appuie les recommandations de santé publique indiquant que les barrières physiques sont appropriées surtout pour les contacts fréquents de courte durée.
Résumé
Les données probantes présentées ici indiquent que les barrières physiques peuvent être efficaces pour réduire l’exposition globale aux particules respiratoires. Or, la littérature soulève un certain nombre de préoccupations. Un examen rapide des directives de santé publique a montré que seules quelques ressources en ligne expliquent en détail comment installer les barrières, possiblement en raison de la complexité des espaces intérieurs et de la difficulté à élaborer les directives. Il semble également que les objectifs fondamentaux de l’utilisation des barrières sont mal compris, ce qui mène à la prise d’initiatives contre-productives (p. ex., enfermer plusieurs personnes dans un compartiment) et à l’utilisation des barrières dans des contextes inappropriés (p.ex., salles de classe). En outre, des exigences clés, comme la nécessité d’une ventilation complémentaire, ne sont pas toujours respectées. Ces constats ne sont pas surprenants compte tenu de la rapidité avec laquelle les barrières ont été déployées dans les milieux de travail et les endroits publics – souvent sans aide technique ni directives précises – et de l’évolution des connaissances sur la transmission de la COVID‑19.
Malgré les enjeux associés à leur déploiement, les barrières physiques peuvent être avantageuses dans certaines situations ou certains milieux, tant pendant qu’après la pandémie. D’autres études sont nécessaires pour comprendre l’importance de leur effet potentiel sur la transmission d’une maladie. Idéalement, les interventions de santé publique ayant la plus grande incidence seraient déployées en premier, mais vu les difficultés liées à leur bonne mise en œuvre, les barrières risquent de ne pas tellement se démarquer. Par ailleurs, la valeur relative des barrières pourrait être plus grande dans certains milieux que dans d’autres; c’est pourquoi d’autres études devraient comparer l’efficacité des barrières dans divers milieux, particulièrement dans les restaurants, où le port du masque n’est pas possible. Enfin, comme on s’intéresse de plus en plus au partage d’air entre personnes, il serait potentiellement utile de se questionner sur le rôle que pourraient jouer les barrières dans les futurs milieux de travail résilients aux pandémies.
Remerciements
L’auteure aimerait remercier Michele Wiens, Sarah Henderson et Lydia Ma, du CCNSE, pour leur aide dans la rédaction de ce document, ainsi que Steve Rogak (Université de la Colombie-Britannique), le Dr Vince Spilchuk (Santé publique Ontario) et deux autres personnes anonymes pour leur contribution à titre de réviseurs externes.
Références
- Parker-Pope T. Those anti-covid plastic barriers probably don't help and may make things worse. New York Times. 2020 Aug 19. Available from: https://www.nytimes.com/2021/08/19/well/live/coronavirus-restaurants-classrooms-salons.html.
- O'Keeffe J, Eykelbosh A. COVID-19 and indoor air: risk mitigating measures and future-proofing [blog]. Vancouver, BC: National Collaborating Centre for Environmental Health; 2021 Jul 6. Available from: https://ncceh.ca/content/blog/covid-19-and-indoor-air-risk-mitigating-measures-and-future-proofing.
- Dofitas B. Philippine COVID-19 Living clinical practice guidelines. Should protective physical barriers be used to prevent COVID-19? Philippine Soc Microbiol Infect Dis - PSMID. 2021;6. Available from: https://www.psmid.org/wp-content/uploads/2021/06/NPI_Protective-Physical-Barriers.pdf.
- Environmental Modelling Group. Role of screens and barriers in mitigating COVID-19 transmission. London, UK: UK Government; 2021 Jul 1. Available from: https://www.gov.uk/government/publications/emg-role-of-screens-and-barriers-in-mitigating-covid-19-transmission-1-july-2021.
- Eykelbosh A. Physical barriers for COVID-19 infection prevention and control in commercial settings [blog]. Vancouver, BC: National Collaborating Center for Environmental Health; 2020 May 13. Available from: https://ncceh.ca/content/blog/physical-barriers-covid-19-infection-prevention-and-control-commercial-settings.
- National Institutes of Health. Proper use of barriers (plexiglass/lexan) in the workplace. Bethesda, MD: U.S. Department of Health and Human Services; [cited 2021 Nov 5]; Available from: https://ors.od.nih.gov/News/Pages/Proper-Use-of-Barriers-Plexiglass-Lexan-in-the-Workplace.aspx.
- US Centers for Disease Control and Prevention. Strategies for protecting K-12 school staff from COVID-19 - Engineering controls. Atlanta, GA: CDC, US Department of Health and Human Services; 2021 [cited 2021 Nov 5]; Available from: https://www.cdc.gov/coronavirus/2019-ncov/community/schools-childcare/k-12-staff.html#engineering-controls).
- University of Washington. University of Washington guidance for plexiglass barriers in support of COVID-19 prevention efforts. Seattle, WA: University of Washington, Environmental Health and Safety; 2020 Jul 9. Available from: https://www.ehs.washington.edu/system/files/resources/COVID-19-plexiglass-barriers-workplace.pdf.
- WorkSafe BC. COVID-19 health and safety: designing effective barriers. Richmond, BC: WorkSafe BC; 2020 May. Available from: https://www.worksafebc.com/en/resources/health-safety/information-sheets/covid-19-health-safety-designing-effective-barriers?lang=en.
- McMaster University. Guidelines for the use of physical barriers during COVID-19 pandemic. Hamilton, ON: McMaster University; 2021 Sep 2. Available from: https://hr.mcmaster.ca/app/uploads/2020/07/Use-of-Barriers-COVID-19.pdf.
- Southwestern Public Health. Physical barriers to prevent the spread of COVID-19. St Thomas, ON: Southwestern Public Health; 2020. Available from: https://www.swpublichealth.ca/en/resourcesGeneral/COVID-19-Resources/COVID-19-Guidance-Physical-Barriers.pdf.
- Abuhegazy M, Talaat K, Anderoglu O, Poroseva SV. Numerical investigation of aerosol transport in a classroom with relevance to COVID-19. Phys Fluids (1994). 2020 Oct 1;32(10):103311. Available from: https://doi.org/10.1063/5.0029118.
- Mirzaie M, Lakzian E, Khan A, Warkiani ME, Mahian O, Ahmadi G. COVID-19 spread in a classroom equipped with partition - A CFD approach. J Hazard Mater. 2021 Oct 15;420:126587. Available from: https://doi.org/10.1016/j.jhazmat.2021.126587.
- Ren C, Xi C, Wang J, Feng Z, Nasiri F, Cao S-J, et al. Mitigating COVID-19 infection disease transmission in indoor environment using physical barriers. Sust Cities Soc. 2021;74:103175-. Available from: https://dx.doi.org/10.1016%2Fj.scs.2021.103175.
- Bartels J, Estill CF, Chen I-C, Neu D. Laboratory study of physical barrier efficiency for worker protection against SARS-CoV-2 while standing or sitting. medRxiv. 2021. Available from: https://www.medrxiv.org/content/medrxiv/early/2021/07/29/2021.07.26.21261146.full.pdf.
- Ye J, Ai Z, Zhang C. A new possible route of airborne transmission caused by the use of a physical partition. J Build Engineer. 2021 2021/12/01/;44:103420. Available from: https://doi.org/10.1016/j.jobe.2021.103420.
- Epple P, Steppert M, Florschütz M, Dahlem P. Partition walls as effective protection from bio-aerosols in classrooms - an experimental investigation. GMS Hyg Infect Control. 2021;16:Doc09-Doc. Available from: https://doi.org/10.3205/dgkh000380.
- Liu Z, Li R, Wu Y, Ju R, Gao N. Numerical study on the effect of diner divider on the airborne transmission of diseases in canteens. Energ Build. 2021 2021/10/01/;248:111171. Available from: https://doi.org/10.1016/j.enbuild.2021.111171.
- Gettings J, Czarnik M, Morris E, Haller E, Thompson-Paul AM, Rasberry C, et al. Mask use and ventilation improvements to reduce COVID-19 incidence in elementary schools — Georgia, November 16–December 11, 2020. Morb Mortal Wkly Rep. 2021 Jan 29;70(21):779-84. Available from: https://www.cdc.gov/mmwr/volumes/70/wr/mm7021e1.htm.
- Lessler J, Grabowski MK, Grantz KH, Badillo-Goicoechea E, Metcalf CJE, Lupton-Smith C, et al. Household COVID-19 risk and in-person schooling. Science. 2021;372(6546):1092-7. Available from: https://doi.org/10.1126/science.abh2939.
- Doron S, Ingalls RR, Beauchamp A, Boehm J, Boucher HW, Chow LH, et al. Weekly SARS-CoV-2 screening of asymptomatic students and staff to guide and evaluate strategies for safer in-person learning MedxRiv. 2021 Mar. Available from: https://www.medrxiv.org/content/10.1101/2021.03.20.21253976v1.
- Ishigaki Y, Kawauchi Y, Yokogawa S, Saito A, Kitamura H, Moritake T. Experimental investigation to verify if excessive plastic sheeting shielding produce micro clusters of SARS-CoV-2. medRxiv. 2021 May 27. Available from: https://doi.org/10.1101/2021.05.22.21257321.
- Dyal JW, Grant MP, Broadwater K, Bjork A, Waltenburg MA, Gibbins JD, et al. COVID-19 among workers in meat and poultry processing facilities - 19 States, April 2020. MMWR Morb Mortal Wkly Rep. 2020 May 8;69(18). Available from: https://doi.org/10.15585/mmwr.mm6918e3.
- Ramos A, Lowe A, Herstein J, Trinidad N, Carvajal-Suarez M, Quintero S, et al. A rapid-response survey of essential workers in midwestern meatpacking plants: perspectives on COVID-19 response in the workplace. J Environ Health. 2021 Jul/Aug;84(1):16-25. Available from: https://www.neha.org/node/62034.
- Waltenburg MA, Victoroff T, Rose CE, Butterfield M, Jervis RH, Fedak KM, et al. Update: COVID-19 among workers in meat and poultry processing facilities ― United States, April–May 2020. Morb Mortal Wkly Rep. 2020 Jul 7;69(27):887-92. Available from: https://www.cdc.gov/mmwr/volumes/69/wr/mm6927e2.htm.
- Herstein JJ, Degarege A, Stover D, Austin C, Schwedhelm MM, Lawler JV, et al. Characteristics of SARS-CoV-2 transmission among meat processing workers in Nebraska, USA, and effectiveness of risk mitigation measures. Emerg Infect Dis. 2021 Apr 2021;27(4). Available from: https://wwwnc.cdc.gov/eid/article/27/4/20-4800_article.
- Khojah HMJ, Itani R, Mukattash TL, Karout S, Jaffal F, Abu-Farha R. Exposure of community pharmacists to COVID-19: a multinational cross-sectional study. J Taibah Univ Med Sci. 2021 Jul 16. Available from: https://doi.org/10.1016/j.jtumed.2021.06.007.