Les cyanobactéries et la qualité de l’eau potable

Qu’ont en commun la mort de chiens à Fredericton, la déclaration de l’état d’urgence à Salem (Oregon) et le nettoyage de lacs en Floride? Tous ces événements, qui ont eu lieu dans la dernière année, sont dus à des organismes photosynthétiques microscopiques appelés cyanobactéries.
Que sont les cyanobactéries?
Plus connues sous le nom d’algues bleu-vert, les cyanobactéries se développent en milieu aquatique et comptent plus de 2 000 espèces. Dans des conditions idéales, soit une abondance de nutriments, des températures assez élevées (plus de 20 °C) et de l’eau calme, ces organismes forment des fleurs d’eau et colonisent rapidement les lacs, les réservoirs et les rivières. Au Canada, la saison des fleurs d’eau s’étend généralement de mai à octobre, mais à certains endroits, on retrouve des fleurs d’eau toute l’année. Celles-ci peuvent être vert bleuté, vertes, rouges ou brunâtres et ressembler à de la soupe aux pois ou à de la peinture; elles s’accumulent généralement à la surface de l’eau, mais peuvent également recouvrir le lit des rivières et des lacs.
Pourquoi les cyanobactéries posent-elles problème?
Les fleurs d’eau sont souvent malodorantes et peu esthétiques, et peuvent provoquer la fermeture des plages et ainsi nuire au tourisme et aux entreprises locales, mais ce n’est qu’une partie du problème. Sous l’eau, elles produisent un véritable cocktail de toxines (les cyanotoxines) qui nuisent à la santé des humains et des animaux contaminés par contact direct ou par consommation d’eau. Les cyanotoxines peuvent affecter le foie (microcystines et cylindrospermopsines) ou le système nerveux (anatoxines et saxitoxines), et peuvent causer des problèmes de santé généraux, comme une irritation cutanée, des maladies gastro-intestinales, de la fièvre et des maux de tête. Une variante, la microcystine-LR (MC-LR), est potentiellement carcinogène pour les humains.
Qu’en est-il de la qualité de l’eau potable?
Même si les cyanobactéries colonisent les plans d’eau canadiens depuis des années, les interventions de santé publique visent surtout à réduire l’exposition dans les loisirs. Le décès de plusieurs chiens ayant été en contact avec des fleurs d’eau a attiré l’attention des médias et sensibilisé la population aux risques des loisirs aquatiques, mais les risques liés à l’eau potable sont moins médiatisés. Si une fleur d’eau se développe près d’un point d’approvisionnement, et que le système de traitement n’est pas équipé pour éliminer les cyanobactéries et les toxines qu’elles produisent, des cyanotoxines peuvent contaminer l’eau potable. Les réseaux d’approvisionnement privés ou de petite envergure sont les plus à risque. L’ébullition et la désinfection de l’eau n’éliminent pas les cellules cyanobactériennes; ces méthodes peuvent même parfois aggraver la situation en faisant exploser les cellules, libérant ainsi les toxines dans l’eau.
Bien qu’aucun cas d’intoxication grave aux cyanotoxines n’ait été signalé au Canada jusqu’à maintenant, des données probantes indiquent que certaines sources d’eau potable peuvent contenir une faible quantité de toxines et provoquer de légers symptômes. Certaines incertitudes persistent quant au degré d’exposition des réseaux d’approvisionnement privés et de petite envergure ainsi qu’aux conséquences d’une exposition prolongée à de faibles concentrations de multiples toxines. La majeure partie de l’eau potable au Canada provient de lacs et de réservoirs, et la prolifération accrue des fleurs d’eau due à la pollution ou au changement climatique peut augmenter le risque d’effets négatifs sur les sources d’approvisionnement desservies par l’eau contaminée.
Prévention des méfaits
Santé Canada a mis à jour son document technique pour les toxines cyanobactériennes en 2018 et a établi une concentration maximale acceptable (CMA) saisonnière de 1,5 µg/L pour les microcystines totales dans l’eau potable. En outre, lorsque des niveaux de microcystines totales supérieurs à la valeur de référence de 0,4 µg/L sont décelés dans l’eau traitée, Santé Canada recommande dorénavant l’utilisation d’une autre source d’eau potable appropriée (comme l’eau en bouteille) pour les préparations pour nourrissons. La plupart des provinces et territoires ont adopté ces nouvelles recommandations dans leur réglementation, mais la réduction du risque d’exposition exige la collaboration de nombreux intervenants, dont les autorités de réglementation environnementale, les professionnels de la santé publique, les services publics et les collectivités.
Envie d’en savoir plus?
Le CCNSE a publié récemment un rapport sur les cyanobactéries et l’eau potable [en anglais seulement] qui étudie la présence des fleurs d’eau, les risques pour la santé, les approches de gestion des risques et les lacunes dans les connaissances de santé publique. Pour en savoir plus, consultez notre page thématique sur les cyanobactéries en eau douce.