Réduire les risques posés par la tique en améliorant l’aménagement et l’entretien de l’environnement extérieur

La présence de tiques devient de plus en plus préoccupante pour la santé de la population au Canada en raison de plusieurs facteurs corrélatifs. Les tiques peuvent contaminer les humains avec des agents pathogènes et causer des maladies. On les trouve dans beaucoup de milieux terrestres. Il y a de plus en plus d’habitats au Canada dans lesquels les tiques peuvent survivre et se multiplier, en raison du réchauffement climatique, de la fragmentation des terres (à cause de la déforestation et de l’urbanisation) et de l’évolution des habitudes migratoires des animaux. On prédit que la distribution des tiques s’étendra de 35 à 55 km par année vers le nord.
Les tiques sont de petits arthropodes lents dont le cycle de vie compte trois stades : la larve (de la taille d’un grain de sable), la nymphe (de la taille d’une graine de pavot) et le stade adulte (de la taille d’un pépin de pomme). À chaque stade de vie, la tique doit se nourrir du sang de mammifères, d’oiseaux, de reptiles ou d’amphibiens, afin de passer au stade suivant. C’est lors de ces repas que les tiques peuvent transmettre des agents pathogènes aux humains et aux autres espèces.
On sait que les tiques sont des vectrices qui peuvent transmettre des agents pathogènes bactériens, viraux et protozoaires aux humains. Au Canada, les principales maladies transmises par la tique sont la maladie de Lyme (Borrelia burgdorferi), l’anaplasmose (Anaplasma phagocytophilum), la babésiose (Babesia microti), l’infection à Borrelia miyamotoi, la fièvre pourprée des montagnes Rocheuses (Rickettsia rickettsii)., la maladie de Possawan et la tularémie. Plusieurs autres pathogènes préoccupants transmis par les tiques émergent en Amérique du Nord, dont ceux causant le syndrome alpha-gal (allergie à la viande rouge), l’ehrlichiose (Ehrlichia chaffeensis), le virus Heartland, l’encéphalite à tiques et la toxoplasmose (Toxoplasmosis gondii). Beaucoup de ces agents pathogènes ne sont pas signalés à l’échelle nationale, et donc la véritable ampleur de ces infections est inconnue et probablement sous-représentée par la surveillance de la santé publique. Il est donc très important de surveiller toutes les piqûres de tiques et les symptômes subséquents, quelle que soit la tique vectrice.
Le risque d’exposition aux tiques est proportionnel au temps passé à l’extérieur dans leurs habitats (hautes herbes, aires boisées, arbustes et les accumulations de feuilles mortes). Les recherches démontrent que les personnes les plus vulnérables aux maladies transmissibles par les tiques sont les gens qui passent le plus de temps à l’extérieur : les enfants de 5 à 14 ans, les adultes de 55 à 79 ans et les hommes. Les activités comme la randonnée pédestre, le camping, le jardinage ou promener le chien et les métiers comme l’aménagement paysager ou la plantation d’arbres augmentent le risque d’exposition aux tiques.
Ce billet de blogue résume les messages clés d’une série de revues basées sur des données probantes du CCNSE, des fiches descriptives et un webinaire sur les risques des tiques dans les parcs et aires récréatives pour accompagner le tout. Le but est de fournir des informations exactes et pratiques sur les moyens de diminuer les risques d’exposition aux tiques dans les parcs, les aires récréatives et les propriétés résidentielles.
Où se trouvent les tiques?
Il y a plus de 40 espèces de tiques au Canada, mais ce ne sont pas toutes les tiques qui transmettent des agents pathogènes aux humains. Les principales tiques vectrices sont : la tique à pattes noires (Ixodes scapularis), la tique occidentale à pattes noires (Ixodes pacificus), la tique américaine du chien (Dermacentor variabilis), la tique des Rocheuses (Dermacentor andersoni), et la tique étoilée d’Amérique (Amblyomma americanum). Ces espèces ont toutes été identifiées au Canada.
On trouve les tiques dans plusieurs milieux terrestres de tout le Canada. La tique à pattes noires (Ixodes scapularis) et la tique occidentale à pattes noires (Ixodes pacificus) privilégient les milieux humides et se cachent souvent dans les litières de feuilles ou dans le couvert forestier. La tique américaine du chien (Dermacentor variabilis) et la tique des Rocheuses (Dermacentor andersoni), quant à elles, privilégient les milieux secs et s’abritent dans les herbes et les arbustes. Enfin, la tique étoilée d’Amérique (Amblyomma americanum) habite les aires boisées et les litières de feuilles.
La distribution des tiques s’étend rapidement en raison du climat et des changements à l’aménagement des territoires. Le principal facteur de l’évolution des populations de tiques réside dans l’augmentation des températures (due au changement climatique), qui accélère leur maturation et réduit leur mortalité. La fragmentation des forêts et les changements dans l’utilisation des terres (la fragmentation des terres par la déforestation et l’urbanisation des forêts naturelles en plus petites sections) en sont aussi un facteur important, car ils facilitent la migration des hôtes (p. ex. les cerfs et les rongeurs) vers d’autres zones.
Quand les tiques sont-elles actives?
Le risque d’exposition aux tiques est à son maximum lorsqu’elles cherchent activement à se nourrir de sang au printemps et en début d’été (de mai à juillet) et pendant l’automne (de septembre à novembre). Il est important de noter que les cycles de vie varient selon l’espèce, ce qui peut augmenter la probabilité d’exposition à différentes périodes de l’année. Les tiques peuvent survivre à l’hiver en s’abritant sous du bois mort, dans des broussailles ou sous la neige. Si la température est au-dessus de 4 °C, les tiques peuvent être actives.
Comment diminuer les risques d’exposition aux tiques?
L’adoption de comportements de protection individuels, combinée à des pratiques de gestion et d’aménagement du paysage, peut réduire efficacement les risques d’exposition aux tiques.
Comportements de protection individuels
Chacun d’entre nous peut réduire le risque de transmission d’un agent pathogène par une tique en adoptant des comportements préventifs tant à l’extérieur qu’à l’intérieur. Cette fiche descriptive sert d’aide-mémoire sur les comportements préventifs à adopter pour réduire les risques de piqûre de tique et la transmission d’agents pathogènes.
Pratiques de gestion et d’aménagement du paysage
Les principes de la lutte antiparasitaire intégrée permettent de gérer la population de tiques grâce à des pratiques réfléchies de gestion et d’aménagement du paysage. En voici les grandes lignes : 1) choisir des plantes qui éloignent les animaux sauvages et les tiques, 2) entretenir les plantes, les pelouses et les terrains pour réduire la densité de la végétation et accroître l’exposition au soleil afin de déshydrater les tiques, 3) installer des clôtures et aménager l’espace à l’aide de matériaux inertes (gravier, pierre, sol nu et copeaux de cèdres) afin de limiter l’accès et les habitats pour les animaux sauvages. Cette fiche descriptive montre le schéma détaillé d’un aménagement paysager inhospitalier pour les tiques, avec une liste de pratiques.
Résumé
Avec l’augmentation de la distribution géographique des tiques en Amérique du Nord, il devient de plus en plus important de limiter les risques de contact humain avec les tiques et les infections qu’elles peuvent transmettre. Il n’y a pas de solution simple. La gestion active des tiques requiert une collaboration interdisciplinaire pour faciliter la vigilance individuelle et la proactivité, la gestion des aires récréatives et des propriétés résidentielles, de l’appui et du financement pour les initiatives de recherche en santé publique, de la surveillance et des pratiques d’utilisation des terres qui réduisent les risques liés aux tiques.
Il faut sensibiliser la population à ces risques, afin que chacun sache à quoi ressemble une tique, où elles se cachent, comment adapter l’aménagement paysager de divers environnements et quoi faire en cas de piqûre. On retrouve parmi les campagnes de sensibilisation innovatrices le site de Tick Talk (destiné aux enfants de 5 à 10 ans) et Spray Safe, Play Safe (une série de courts-métrages qui expliquent comment gérer les risques dans sa cour). Des applications pour téléphone intelligent et des plateformes Web comme e-tick peuvent aussi permettre d’identifier les tiques et faciliter la surveillance de la santé publique grâce aux données générées en temps réel par la science participative. L’intelligence artificielle pourrait aussi jouer un rôle pour identifier l’espèce de tique en temps réel.
Afin de faciliter la communication des risques, le CCNSE a créé des fiches descriptives pratiques sur les tiques dans un environnement changeant. Les quatre pages fournissent des informations sur les tiques, leur habitat, l’aménagement et la gestion des espaces extérieurs et les mesures à prendre pour réduire les risques de se faire piquer. Ces fiches sont destinées aux gens qui travaillent dans les parcs et les espaces récréatifs extérieurs, aux paysagistes, au personnel d’entretien paysager des résidences ainsi qu’à tous ceux et celles qui aiment être dehors. Faciles à distribuer et à utiliser, ces fiches peuvent être téléchargées toutes ensemble ou séparément.
Auteur
Negar Elmieh est une chercheuse et éducatrice interdisciplinaire qui défend les enjeux de la santé et de l’environnement.
Note pour l’infolettre :
Les tiques sont de plus en plus préoccupantes pour la santé de la population canadienne. Les populations de tiques s’établissent dans de nouveaux milieux dans tout le pays, à cause du réchauffement climatique, de la fragmentation des terres et des changements dans les habitudes migratoires des animaux. Ce billet de blogue résume les messages clés d’une série de revues basées sur des données probantes du CCNSE et de fiches descriptives sur la façon d’aménager un environnement extérieur pour réduire les risques liés aux tiques. On trouve aussi un enregistrement du webinaire qui résume les résultats du projet disponible ici.